J'ai l'honneur d'être une fille
Sur l'album Indesctrutible de Véronique Sanson, il y a une chanson qui s'appelle J'ai l'honneur d'être une fille. Les premières paroles sont "j'aurais voulu être un garçon". C'est une réflexion que je me suis souvent faite lorsque j'étais plus jeune. J'étais un garçon manqué, et la psychologie à 2 balles ne manquera pas de relever que c'est pour ça je vis avec une femme. Je portais les cheveux courts, mal coupés, je jouais toujours avec des garçons, ce qui ne m'empêchait pas de les regarder avec d'autres yeux que ceux d'un bon copain. Et puis, au fil du temps, les choses ont changé, mes cheveux ont poussé, mes jeans se sont faits plus rares, je crois que je suis devenue une vraie fille même s'il parait que je cultive un look vestimentaire bien à moi.
Aujourd'hui, je m'interroge, pourquoi est-ce qu'il m'a fallu tant de temps pour devenir une fille ? Chaque interrogation, ces derniers temps, se termine de la même façon, chaque début de réponse que je pense trouver me renvoie irrémédiablement vers ma mère et ce matin, je me suis dit qu'une part de mon problème venait du fait qu'elle n'avait pas élevé une fille mais "juste" un enfant. L'autre dimanche, quand nous avons regardé le documentaire d'Arte sur les filles et leurs règles, on s'est dit qu'on pourrait envoyer le lien à la cousine de Mutine, qui a fêté ses 11 ans il y a peu et entre dans cette période où on se pose plein de questions. Je ne sais pas si elle l'a ou non regardé avec sa maman. Mais j'aurais aimé que la mienne prenne du temps pour parler avec moi de tout ça et non pas qu'elle se contente de me dire que c'est comme ça quand on est une fille, que ça revient tous les mois, qu'on en prends pour trente ans et point final. Aucune explication. Et cette réflexion récurrente "il faut attendre que ça passe" quand j'avais mal au ventre raisonne encore dans ma tête. Comme si être une fille était une maladie, qu'on ne pouvait pas guérir.
Plus le temps passe, plus les questions se multiplient, certainement parce que la pause forcée laisse le temps de réfléchir. Je commence à comprendre pourquoi j'aimerais tant qu'on MiniChouchou soit un garçon, au moins MiniChouchou numéro 1. Pourtant, quand j'y pense, je suis intimement convaincue que je ne serai pas avec notre fille comme ma mère a été avec moi. Naïvement, je pensais que les parents avaient un témoin à transmettre à leurs enfants, pour qu'ils deviennent à leur tour adultes, parents. Aujourd'hui, c'est (presque) seule que je dois me débrouiller, face à une indifférence que je ne soupçonnais pas. Tout se mêle, parentalité, trentaine qui pointe son nez et comme un basculement violent du côté d'une vraie vie d'adulte.
Cactus